Syrie, Enfer et Paradis-Tome 2

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By Benak

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La présentatrice irakienne souriait de tous les pores de son visage ; elle annonçait de sa voix chaude et un tantinet grave que les troupes d'Al-Assad avaient essuyé des revers importants sur toute la ligne de front sous les coups de boutoir de l'Armée libre. Al-Abria, une autre chaîne « hakira » (vile), brillait par son insolence et son hypocrisie proverbiale. D'obédience américaine, ce média lourd n'a été créé que dans le but de caresser dans le sens du poil en commettant d'innombrables dérapages. Du haut de sa beauté insolente, la demoiselle dont les grands yeux noirs riaient distillait la grosse bêtise de l'esprit oriental. Yatim n'arrivait pas à comprendre cet acharnement démesuré qu'avaient ces gens enturbannés roulant sur l'or à l'encontre de tout ce qui s'apparentait à de vraies valeurs. Il ne saisissait pas la haine que vouaient ces riches douaristes (habitants d'un douar), selon les termes de l'éminent Ibn Khaldoun dans sa non moins célèbre Moquadima, à tout ce qui était révolutionnaire et musulman. Ces faux chantres de l'arabité et de l'Islam ne portaient pas en sainteté tous ceux qui gravitaient autour de ces deux entités. La voix de l'animatrice buta quelque peu sur l'Irak, en déclarant que Bagdad était secouée par de violentes explosions. Cependant, elle oubliait de souligner le nom du commanditaire qui n'était autre que son fameux employeur. Son sourire rose s'étala sur les cadavres calcinés et les corps déchiquetés de pauvres hères dont le seul tort était de se trouver au mauvais endroit à la mauvaise heure. Le rouge indécent sur ses lèvres s'ombra de taches de sang de centaines de blessés que d'autres dont la vie était en sursis essayaient de secourir en utilisant leurs moyens de fortune, au milieu de leurs cris de douleur. Le noir de ses yeux ronds se tonifia à la noirceur désarmante des dépouilles carbonisées, des méchouis que les Bédouins prisaient depuis la nuit des temps. — Sers à tes seigneurs cette horrible parade, madame, la gueuse séfarade ! Yatim était dégoûté de ces rabat-joies qui criaient à longueur de journée. Ils donnaient envie de vomir tellement les cloaques qui leur servaient de bouche déversaient de nauséabondes paroles à plein temps. La roulure s'arrêta un instant de diffuser sa prostitution verbale pour laisser justement le pigeon auditeur savourer sa lasciveté narrative en dégustant la parenthèse trop ouverte à l'image de sa personne, la vénus de carrefour. En effet, Son Altesse siégeant au sommet de la bâtardise était l'invité de la belle-de-jour de ce journal télévisé exceptionnel. Cheveux tout à fait noirs à soixante-dix ans, le frère siamois du pingouin ne tarissait pas d'éloges à l'endroit de la péripatéticienne tout en sourire qui lui ouvrait déjà toutes les portes bleues de l'infamie. Le rat d'égout ne tarda pas à puiser dans la largesse de sa poubelle pour dégurgiter des insanités à l'égard de véritables seigneurs qui n'avaient nullement droit de cité. Son merdier voila tout l'écran et les yeux de millions de spectateurs au-delà de la riche citadelle et de la perfide Albion. Yatim n'arrivait plus à sentir ces professionnels des mots où l'imposture avait atteint le summum dans la mystification des choses et leur maquignonnage. Il respira profondément dans le dessein d'expirer fortement afin de se vider de son trop-plein de mal, car la cocotte sur le feu de son esprit risquait à tout moment d'exploser. Le sifflement de l'air qu'il expulsa disait long sur son abattement. Il était écœuré de ses semblables qui ne disposaient d'aucun sens de l'honneur, l'homme étant un ensemble de jours et une somme de valeurs. Un être jouissant d'un minimum de raison ne pouvait descendre si bas pour le but de complaire.
Syrie, Enfer et Paradis-Tome 2