L'Amour et le Sang-Tome 6

ebook

By Benak

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Elle relut encore une fois le bout de papier comme pour y démasquer d'autres non-dits, ou sous-entendus, sinon des signaux qui l'auraient rassurée. Seulement, la réalité s'imposait dans toute sa véracité, loin de toute fiction comme seule et unique dimension. Tout s'était arrêté en elle et autour d'elle, comme si la vie prenait une pause dans la temporalité. Tout son monde s'écroulait sous son regard terne et livide. L'existence n'avait plus ce goût sucré qui lui chatouillait le cervelet, en la lui faisant encore adorer. Certes, les mots étaient simples et gentils, obséquieux et débordants d'humilité ; ils étaient écrits dans une encre d'une certaine timidité pour ne pas dévoiler toute leur intimité. Cependant, ils étaient clairs et tellement suffisants ; leur cohérence très nette ne laissait aucun doute quant à leur transparence subtile qui pénétrait comme un foret dans la pensée. Le lit ne grinçait plus sous son poids, car elle était immobile sans voix, n'écoutant que le bruit de sa respiration qui imprimait à son buste, un rythme assez soutenu. Elle déployait un effort colossal pour juguler le malheur qui entrait par bottes entières, dans son pauvre cœur. « À chaque faux pas correspond un remède. Alors, prends soin de ton jardin et de tes fleurs » disait aussi le billet qu'elle tenait toujours dans la main. Son jardin ne comportait que quelques fleurs, mais elle les aimait tant. Ces fleurs-là étaient les seuls agréments de sa vie et ses précieux condiments. Elle ne pouvait penser l'existence sans elles, car elle avait pris l'habitude de composer en leur compagnie tout ce qu'elle envisageait. Samia ! Ikram ! Ibtissem ! Elles étaient trois jolis papillons virevoltant gaiement dans le ciel de son printemps, une saison aux couleurs de l'arc-en-ciel où le bleu des yeux de l'une, associé au vert de ceux des deux autres, l'emportait allègrement. Samia qui alliait beauté et intelligence éclairait de son étoile d'une rare brillance, le firmament déjà parfumé de ses jeunes années. Une lumière opaline irradiait toujours d'elle tel le sourire qui était l'habitant le plus enjoué de ses lèvres. Son ombre planait dans toute la maison tellement ses empreintes signaient tous les coins et recoins auxquels ne manquait que la parole pour dire sa présence. Ikram la généreuse, dont la naissance avait apporté une touche radieuse au joli tableau, égayait par le ton de ses nuances, un paysage où les couleurs à l'unisson jetaient un charme fou à tous les horizons de la petite famille heureuse. Ibtissem par qui le rire arrivait était la joie par excellence ; elle était venue par décret suprême couronner la recette familiale par l'apport d'un miel exotique sentant l'ambre et le musc qu'elle déversait au milieu de ses sourires, comme autant de fleurs qu'elle distribuait. Depuis sa venue jusqu'à ses quatorze ans, elle n'avait jamais posé de problèmes à ses parents. À l'inverse de ses sœurs, son accouchement fut tellement difficile qu'elle fut extirpée à force de forceps. Elle refusa, d'emblée, de saluer le monde en donnant du fil à retordre au médecin qui la secouait pour en tirer le premier cri. Ce n'est que lorsqu'il lui asséna plusieurs tapes sur le petit fessier rose que sa poitrine fine et fluette s'anima franchement pour qu'un râle se transforme enfin en un vagissement heureux, apportant le grand soulagement. Sa gentillesse avait bouleversé sa mère les premiers temps ; elle dormait comme un loir, ne se réveillant qu'aux premières lueurs du matin pour accueillir sans pleurer, son premier biberon de la journée. Quand elle criait, c'est qu'elle avait mal ou faim, sinon c'était le calme plat et le silence total. Mounia s'était habituée sans peine à ce bébé qui n'était nullement exigeant. Calme et...
L'Amour et le Sang-Tome 6